Nous avons à plusieurs reprises exploré l’espoir suscité par les cellules souches dans la prise en charge de la DMLA, en y consacrant même un dossier complet dans le n°29 (novembre 2013) de notre magazine « La lettre de l’Association DMLA » (réservée aux adhérents). Les récents résultats d’une équipe japonaise, publiés le 15 mars 2017 dans The New England Journal of Medicine (NEJM), ajoutent une pierre à cet édifice : une patiente souffrant d’une DMLA avancée et traitée il y a deux ans, voit aujourd’hui sa maladie stabilisée. Le traitement administré ? L’injection de cellules dites iPS (acronyme de l’anglais induced pluripotent stem) dérivées de cellules de peau de la patiente : ces cellules, identiques à des cellules souches embryonnaires (donc capables de donner naissance à n’importe quel tissu : du foie, de l’œil, de la peau…), sont obtenues par reprogrammation génétique de cellules adultes différenciées (ici, des cellules de peau) et non d’embryon. Autrement dit, on a injecté des cellules de peau que l’on avait « ramenées » à l’état embryonnaire pour qu’elles puissent donner naissance à de nouvelles cellules rétiniennes. Avantage : aucun risque de rejet puisque ce sont des cellules de la patiente elle-même.
Selon les résultats des scientifiques, ce traitement par cellules iPS dérivées de cellules de peau n’a pas restauré la vision initiale de la patiente la patiente ; néanmoins, il a permis de stopper la progression de la maladie. Ainsi, la DMLA de cette patiente est restée stable au cours des deux années qui ont suivi l’injection.
Bien entendu, un essai auprès d’un seul patient ne peut permettre de tirer des conclusions. Mais Masayo Takahashi, ophtalmologiste et chercheuse au RIKEN Center for Developmental Biology, à l’origine de ce premier essai clinique chez l’homme, ne compte pas s’arrêter là : elle a reçu il y a un mois l’autorisation de poursuivre des essais supplémentaires chez 5 autres patients souffrant d’une DMLA avancée.
Pour cette seconde série d’essais, l’équipe compte recourir à des cellules iPS issues d’une banque de cellules dérivées d’un seul et même donneur et non des cellules dérivées de chaque patient. Pourquoi un tel changement ? Parce que faire revenir à un état « embryonnaire » des cellules de peau de chaque patient coûte cher, très cher (environ 900 000 dollars) et s’avère très long. Mais pas seulement : faire « régresser » des cellules de peau d’un patient atteint de DMLA avancée (et donc par définition âgé) accroît le risque de voir apparaître des mutations (et donc des tumeurs). D’où l’idée des chercheurs de constituer des banques de cellules iPS qui, à l’image des banques de sang, seraient utilisables pour les patients en cas de besoin. Des compatibilités doivent néanmoins être respectées, comme pour les groupes sanguins.
Et l’équipe japonaise de préciser que, quand la technique sera mieux maîtrisée, elle pourrait bénéficier à des patients souffrant d’une DMLA moins avancée. Pour autant, l’équipe ne veut pas créer de faux espoirs : les cellules iPS pourraient aider mais ne vont pas non plus redonner la vue aux patients comme ils en rêveraient.