Et si un moyen de prévention de la DMLA passait par notre flore intestinale, aujourd’hui rebaptisée microbiote intestinal ? C’est l’hypothèse d’une équipe japonaise qui travaille sur une bactérie lactique particulière appelée Lactobacillus paracasei KW3110 (L. paracasei KW3110).
Le microbiote, une piste pas si farfelue…
Rappelons en préambule que le tube digestif abrite entre 1 000 à 100 000 milliards de micro-organismes non pathogènes, en particulier des bactéries mais aussi des virus et des champignons. Soit 2 à 10 fois plus que le nombre de cellules qui constituent notre corps ! Le rôle de ces micro-organismes est de mieux en mieux connu et les chercheurs tentent aujourd’hui de comprendre les liens entre les déséquilibres du microbiote et certaines pathologies. Ainsi, on considère la dysbiose, c’est-à-dire le déséquilibre de la flore intestinale, comme une piste sérieuse pour comprendre l’origine de certaines maladies, notamment celles sous-tendues par des mécanismes auto-immuns ou inflammatoires… comme dans le cas de la DMLA.
Une bactérie lactique sous le microscope
L’intérêt des Japonais pour la bactérie lactique L. paracasei KW3110 repose sur une double observation. D’une part, l’équipe avait déjà constaté que cette bactérie spécifique renforçait l’action de globules blancs, appelés macrophages, qui réduisent l’inflammation chez la souris et l’homme. D’autre part, ils ont également montré que la consommation de L. paracasei KW3110 pouvait atténuer certains troubles oculaires chez l’homme.
D’où l’étape suivante : comprendre les mécanismes biologiques sous-jacents. C’est ce à quoi s’est attelée l’équipe ces derniers mois. Un travail qui vient de faire l’objet d’une publication dans la revue scientifique internationale Nutrients.
Des expériences sur des cellules et sur la souris
Dans cette étude fraîchement publiée, l’équipe japonaise explique avoir observé, in vitro (donc sur des cellules isolées) que la bactérie L. paracasei KW3110 activait certains macrophages (M2), induisant la production de molécules anti-inflammatoires (en l’occurrence des interleukines-10 ou IL-10).
In vivo (= dans des souris vivantes), ils ont observé que, 6h après la consommation de la bactérie L. paracasei KW3110, les tissus immunitaires intestinaux des animaux stimulaient leurs systèmes de fabrication de l’IL-10.
Enfin, les chercheurs ont démontré que la consommation de L. paracasei KW3110 supprimait l’inflammation et la dégénérescence des photorécepteurs chez des souris de laboratoire spécifiques, qui souffrent de rétinopathie induite par la lumière.
Des espoirs, à moduler
Selon les chercheurs, ces nouveaux résultats laissent espérer que L. paracasei KW3110 puisse avoir un effet préventif contre les maladies rétiniennes dégénératives. Selon eux, « la prise orale de L. paracasei KW3110 a eu un effet positif sur la morphologie et la fonction rétiniennes. Ces découvertes suggèrent que L. paracasei KW3110 pourrait potentiellement servir de complément alimentaire pour prévenir la dégénérescence rétinienne en régulant l’inflammation en réponse aux dommages causés par la lumière bleue. »
Pour autant, de la souris à l’homme, il y a un grand pas que l’on ne peut pas encore franchir. Et il faudra attendre d’autres expériences pour savoir si un tel supplément pourrait prévenir ou ralentir les phénomènes inflammatoires mis en jeu dans la DMLA.
Source : Lactobacillus paracasei KW3110 Prevents Blue Light-Induced Inflammation and Degeneration in the Retina. Nutrients 2018, 10(12), 1991.