Visions de motifs géométriques simples ou de scènes beaucoup plus complexes impliquant des animaux, des personnes et des lieux : certaines personnes atteintes de DMLA souffrent d’hallucinations tout en étant conscientes que ces « visions » n’existent pas. Bien connu des ophtalmologistes, ce phénomène s’appelle le syndrome de Charles Bonnet.
La piste de l’hyper-excitabilité
Comment expliquer ces « visions » chez certains patients ? Parmi les pistes suggérées : l’idée que le niveau d’activité – ou « d’excitabilité » – de certaines régions visuelles du cerveau pourrait jouer un rôle.
Pour en savoir plus, des chercheurs de l’Université du Queensland (Australie) ont stimulé les champs visuels périphériques des participants de leur étude. Leurs résultats ? Les personnes souffrant d’hallucinations manifestaient effectivement une activité considérablement accrue dans certaines parties de leur système visuel, comme l’expliquent les chercheurs dans l’article qu’ils viennent de publier dans la revue Current Biology.
Mesurer l’activité électrique du cerveau
« Nous avons utilisé l’électro-encéphalographie pour mesurer l’activité électrique du cerveau de trois groupes de personnes : un groupe de patients atteints de DMLA et souffrant du syndrome de Charles Bonnet, un groupe DMLA sans hallucinations, et un groupe contrôle constitué de personnes âgées présentant une bonne santé visuelle », explique le principal auteur de la publication, le Dr David Painter. Et de poursuivre : « Lorsque nous soumettons à des exercices visuels des personnes atteintes de DMLA qui déclarent avoir des hallucinations, on observe une activité cérébrale visuelle énorme par rapport aux participants qui souffrent de la même perte visuelle mais sans hallucinations. »
Les éléments déclencheurs
Bien que les personnes atteintes de dégénérescence maculaire et souffrant d’hallucinations aient présenté une hyper-excitabilité visuelle, la traduction de cette hyper-excitabilité en hallucinations n’était pas automatique et dépendait de déclencheurs externes inconnus à ce jour. « Au cours des tests, aucun de nos participants n’a ressenti d’hallucinations. Ce n’est donc pas l’excitabilité accrue du cerveau qui provoque des hallucinations – c’est un autre facteur », considère le Dr Painter. « Parfois, les gens ressentent ces hallucinations quand ils sont dans des périodes de faible stimulation sensorielle, par exemple dans des conditions de faible luminosité ou d’inactivité ; mais pour d’autres, cela peut être déclenché par des promenades en voiture ou la télévision. » Autrement dit, il existe une grande variabilité d’un individu à l’autre.
Rassurer sur ces hallucinations
Quoi qu’il en soit, il demeure important que ces hallucinations ne soient pas taboues. « Quand les gens vieillissent et commencent à vivre ces expériences inhabituelles, ils redoutent une pathologie lourde, notamment une démence, et ont donc tendance à ne pas signaler les hallucinations de peur d’être traités différemment », insiste le Dr Painter. « Une fois que les gens réalisent que ce n’est pas un trouble du cerveau, ils ont tendance à avoir une expérience neutre ou même positive de leurs hallucinations. Contrairement aux hallucinations chez les personnes atteintes de schizophrénie, par exemple, les personnes atteintes du syndrome de Charles Bonnet sont conscientes que leurs hallucinations ne sont pas réelles. »